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"Les Théâtres de Paris"
Au milieu du 19ème siècle, la photo stéréoscopique suscite un grand engouement. Mais l'obligation de prendre deux vues successivement limite son emploi à des sujets fixes, et l'intérêt se trouve limité à des vues de sites touristiques.

Vers 1858, Louis Alfred HABERT trouve une idée originale : réaliser des vues stéréoscopiques des spectacles de théâtre. Il utilise son talent de sculpteur pour réaliser les personnages (10 à 20 cm de hauteur) des spectacles de Paris, Puis, il les met en scène, réalise les décors, et les photographie en deux vues décalées pour obtenir un relief par effet stéréoscopique.
Il s'associe à son ami Adolphe BLOCK pour commercialiser son travail sous le titre "Les Théâtres de Paris".
    
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Extrait du livre de Denis Pellerin
Chemin de Croix : 6e station - 1893
Maître dans l'art de modeler diablotins et squelettes, L.A. HABERT a aussi collaboré à deux séries religieuses.
Dans son livre "La photographie stéréoscopique sous le second Empire", Denis PELLERIN nous apporte des précisions sur cette activité :
Comme leurs confrères illustrateurs et caricaturistes, les photographes stéréoscopiques flattent les goûts de leurs contemporains. Puisque le public est friand de théâtre, ils s'intéressent tout naturellement à ce type de spectacles. On fait appel à des sculpteurs qui confectionnent des figurines, bâtissent soigneusement le décor et disposent le tout dans un espace restreint facile à éclairer...
Les photographes Adolphe BLOCK, François LAMICHE et Jules MARINIER sont les maîtres du genre
. Le sculpteur HABERT travailla dès 1860 pour LAMICHE, avant de s'associer à l'éditeur BLOCK à partir de 1868. Louis COUGNY, Pierre Adolphe HENNETIER et F. GEORGES, qui modelèrent tous trois des diableries, imitèrent ses compositions sans jamais toutefois parvenir à l'égaler."
Louis Alfred HABERT commence par les opéras : il va aux spectacles, dessine les scènes successives, et les recrée en maquettes avant de les photographier en stéréoscopie.
C'est peut-être la scène de l'acte 3 de La Biche aux bois, où apparaissent des squelettes, qui lui donne l'idée de réaliser "La vie aux enfers", plus connue sous le titre de "Diableries". Avec semble-t-il la collaboration d'un autre sculpteur de l'époque : HENNETIER, il réalise plus de 70 tableaux, avec beaucoup d'humour.

Il y a une trentaine d'années, un collectionneur acheta chez un brocanteur de Montreuil une caisse contenant les plaques photographiques de ces Diableries. Elle avait été trouvée lors de la démolition d'un immeuble du nord-est parisien. Une lettre s'y trouvait : "Ceci est le travail de toute ma vie. C'est ainsi que j'ai rêvé les enfers. Si j'ai vu juste, que les méchants se rassurent, l'éternité sera pour eux bien douce à supporter."
Je n'ai pas pu obtenir une copie de ce document pour l'authentifier, mais nul doute qu'elle a été écrite par Alfred HABERT (à sa mort, il habitait Belleville, rue du Pré-Saint-Gervais).

Scène de "la biche au bois"


Scène stéréo de Lakmé

D'après Denis PELLERIN, Alfred HABERT a réalisé une cinquantaine de diableries.
Dans
son stéréoscope (que j'ai la chance d'avoir), il y a :

 * 16 tableaux de diableries datés
1860,
 * 15
opéras en 6 ou 12 tableaux chacun, 
 *  la
vie de Jésus en 24 tableaux.


 
  Stéréoscope de A. HABERT

contenant environ 200 vues

Un peu de technique

Le papier albuminé de la photo est très fin afin de laisser apparaître par transparence les couleurs apposées au dos de la photo (Les photos, en noir et blanc, devaient être colorisées). 
Ces couleurs n'apparaissent que lorsque l'on regarde la photo vers la lumière. Des petits trous d'épingle ou des entailles permettent de simuler des points de lumière *. Une couche très fine de papier permet de protéger l'arrière de la photo, sans trop absorber de lumière. L'ensemble est fragile et trop souvent victime de perforations et déchirements.
Un carton assez épais assure la rigidité de l'ensemble. Cela permet de rentrer la plaque dans la visionneuse (un stéréoscope) pour les voir en relief.

*Procédé utilisé pour les lustres (la Bourse aux enfers), les épées (Duel des Huguenots), les cascades (La biche au bois), ...

Diableries                  Voir 
- Le laboratoire de Satan
- Visite
du Roi Soleil à Satan
- La Bourse aux enfers
- Le mariage de Satan
- Satan malade
- Les 7 péchés capitaux
- Les patineurs de l'enfer
- Les clodoches de l'enfer
- Cou
urse de vélocipèdes
- Les pompiers de l'enfer
- Un square en enfer
- Salle de jeu chez Satan

- Le jugement dernier
- La chaudière du diable
- Magasin de crinolines
- Satan journaliste
- Conférence de Me
lle Satan

Opéras et opérettes          Voir
Spectacles en 6 ou 12 tableaux
 
- L'Africaine, opéra de Meyerbeer
- Aïda,
opéra de Giuseppe Verdi
- Le Barbier de Séville,
opéra de Rossini
- La Biche au bois, féérie de Cogniard
- Cendrillon,
opéra de Massenet
- La Favorite,
opéra de Donizetti
- Le Freischutz,
opéra de Weber
- Guillaume Tell,
opéra de Rossini
- Les Huguenots,
opéra de Meyerbeer
- Lakmé,
opéra de Leo Delibes
- Lucie de Lammermoor,
opéra de  Donizetti
- Mignon,
opéra d'Ambroise Thomas
- La Muette, opéra de Auber
- Peau d'âne,
conte de Charles Perrault
- Yedda ,
ballet de Olivier Métra


Adolphe BLOCK, éditeur,
ami de A. HABERT

Passionnés par les "Diableries", Brian MAY (guitariste des Queens), associé à Paula FLEMMING et Denis PELLERIN décident de réaliser un ouvrage intitulé : "Diableries, aventures stéréoscopiques en Enfer" (avec un dispositif permettant de voir les reproductions en relief).
Le 25 novembre 2014,
à l'Hôtel Sully à Paris, Brian MAY et Denis PELLERIN présentent à la presse l'édition française de cet ouvrage.
Arrière-petit-fils d'Alfred HABERT, j'y suis invité, accompagné de ma femme Gisèle, ma fille Claire et de mon petit-fils Matthieu.



Michel, Brian May, Denis Pellerin
à l'Hôtel Sully.



Gisèle, Matthieu, Michel et Claire
autour de Denis Pellerin et Bryan May