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Joseph Valerio,
verrier à Liège (Belgique) 
Acte de naissance de
Charles
Joseph BRUNETTI

 

L’an 1829, le 13 du mois de février à 9 heures du matin, par devant nous Antoine Leclerq, ... officier public de la commune de Chênée, canton de Héron, district et province de Liège, est comparu Joseph BRUNETTI âgé de 35 ans, vitrier, domicilié à Chênée. Lequel nous a présenté un enfant de sexe masculin né aujourd’hui à Chênée à 1 heure du matin de lui déclarant et de Marie Anne BRUNETTI, son épouse, ménagère, âgée de 31 ans,  et a déclaré donner le prénom de Charles Joseph.
Joseph Valério est "verrier". Le travail manque dans le Tessin et beaucoup d'artisans du verre émigrent en Belgique où leur compétence est très appréciée. Joseph Valerio et Marie Anne s'expatrient et s'installent à Chénée, près de Liège, en Belgique, région où l'industrie du verre est en pleine expansion.
Ils ont au moins trois
enfants :

  • Charles Joseph, né à Chénée le 13 février 1829, s'installe à Paris comme doreur sur verre. Il meurt à Menton en 1921.
  • Pierre né vers 1830, meurt à 25 ans lors de la bataille de Crimée.
  • Abbondio César né à Arbedo le 31 août 1867, s'installe lui aussi à Paris comme doreur sur verre. Il meurt à Arbedo à 55 ans.
Mais Joseph Valério et Marie Anne avaient toujours une  résidence à Arbedo. Un document manuscrit du 10 septembre 1860 fait état d'une estimation de vignes de Valério "...habitant Arbedo" (il avait 67 ans) pour un montant de 2.191 francs suisses.


Atelier du verre au 19ème siècle
       
Verres de Chénée
Les artisans du verre

Au XVème siècle, les verriers vénitiens parviennent à produire un verre de qualité, limpide et léger, d'une grande plasticité, appelé  "Cristallo" ou "cristal de Venise".
Il est obtenu à partir de soude d'Égypte et de galets de quartz du Tessin. Grâce à cette présence de quartz, des verreries se sont créées dans le Tessin.

Au village de Giornico, à 24 km de Bellinzona, le Musée de la Leventine présente des témoignages du passé de la vallée.

Dans la province de Liège, on note une mobilité des artisans du verre assez particulière. Le haut degré de qualification requis et la rareté des verriers expliquent la grande diversité de lieux de provenance, notamment du Tessin.
En 1872, une usine pour la fabrication de la verrerie de table, dirigée par Alexandre Amiable, s'installe à Chénée. Après avoir été reprise en février 1888 par la verrerie de Vaux, la verrerie de Chénée continue en 1895 sous la direction de  François Delahaize.
Pierre est parti en Crimée lors de la guerre contre la Russie. On a retrouvé des lettres émouvantes, écrites par Pierre à son frère Charles. Comme papier à lettres, il utilise un tract ramassé à Sébastopol.
Il souffre de la faim et du froid :
" Si je meurs de faim, il y en aura bien d'autres avant...".
Ces lettres datent de février et mars 1856. Il meurt peu après.
La paix mettant fin à la guerre de Crimée
a été signée le 30 mars 1856 !




                                                          Au camp de Stroliska, ce 15 février 1856.
Mon cher frère
Je ne puis mieux commencer ma lettre qu ‘en te souhaitant une bonne et heureuse année et de la prospérité dans ton petit établissement. Pour le moment ici, il n’y a pas grand chose de nouveau si ce n’est le froid qui nous a empoignés. Nous passons des fois de tristes journées et encore de plus tristes nuits. Tu ne peux te figurer le froid qu’il fait. Quelque fois, il faut tous les jours être dehors soit pour aller au travail, soit pour aller chercher du bois pour les cuisines, toujours dans la boue jusqu’au cou, ou bien dans la neige. J’ai vu des jours qu’il fait 25 à 26 degrés* de froid, et toujours un vent qui vous jette les tentes par terre comme un rien.
Mais ne t’inquiète pas de moi, je me tirerais toujours d’affaire. Si je meurs de faim, moi, il y en aura bien d’autres avant. Beaucoup sont déjà partis pour l’ambulance avec les mains, les pieds ou les oreilles gelées. Du reste, c’est toujours de même. Les Russes sont toujours à côté de la ville sur leur position, tirent de temps en temps un coup de canon pour faire voir qu’ils sont là. Mais je crois qu’il n’y aura pas d’hostilités avant le printemps.
Je finis en te priant de me donner quelques nouvelles de Paris et de ce que l’on dit de la guerre. Et je te prierais aussi de me marquer sur ta lettre si je dois donner des nouvelles de Mozzanino, car je me rappelle qu’une fois, tu m’en avais demandées. Tu feras bien des compliments de ma part à ton associé et à tous les camarades.

 Je t’embrasse de tout mon cœur. Ton frère.
                                                                                                            
Pierre Brunetti
PS Tu m’excuses si je t’écris avec ce papier, mais tout est rare : l’encre et le papier. J’ai ramassé celui-ci dans Sébastopol.
.

                                                                                                            
  *  Il s’agit sans doute de degrés Fahrenheit : 25 / 26 °F = – 3 / – 4 °C